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Luis Garcia-Larrea et John N. Wood

Le Prix scientifique de la Fondation NRJ, d'un montant de 100 000 euros, sur le thème de recherche "la douleur et ses traitements", récompense MM. Luis Garcia-Larrea et John N. Wood.

Film de présentation de Luis Garcia-Larrea et John N. Wood

Luis Garcia-Larrea

Luis Garcia-Larrea

Luis Garcia-Larrea et son équipe : au service du bien-être collectif et individuel

Luis Garcia-Larrea, médecin de 52 ans spécialisé en neurophysiologie clinique, est directeur de recherche à l’lnserm, et dirige l’unité "Intégration centrale de la douleur" à l’hôpital Neurologique Pierre Wertheimer, à Lyon. Cette unité mixte est soutenue par l’Inserm, l’Université Claude Bernard à Lyon et l’Université Jean Monnet à St Etienne.

Son équipe, composée de chercheurs et de cliniciens, travaille depuis 15 ans sur les mécanismes de la douleur. Elle étudie les phénomènes cérébraux de transmission, de perception et de contrôle de la douleur chez l’Homme. Ces mécanismes sont abordés aussi bien dans le contexte de la douleur physiologique que dans celui des changements pathologiques transformant la douleur-alerte en "douleur-maladie", source de souffrance chronique.

Luis Garcia-Larrea et Michel Lazdunski

En collaboration avec des collègues européens, Luis Garcia-Larrea et les chercheurs de son unité Inserm participent activement à la réalisation et à l’actualisation de recommandations internationales sur l’évaluation et le traitement de la douleur, dans le cadre de l’ European Task Force on Neurostimulation for Neuropathic Pain, et des European Guidelines for neuropathic pain assessment.

De la douleur physiologique, à la douleur neuropathique

La douleur physiologique est un signe d’alarme essentiel pour la protection de l’organisme. Son absence entraîne des conséquences délétères : la douleur est non seulement indispensable à l’évitement des objets dangereux, mais également à la détection d’une blessure infectée ou à l’immobilité nécessaire pour consolider les fractures. Les conséquences d’une incapacité à percevoir la douleur sont graves (apparition de gangrènes, risque de brûlures de haut degré ou de fractures non résolues) et à terme, entraînent une espérance de vie réduite.

Comparée à cette douleur physiologique et utile, la douleur dite "neuropathique" est dépourvue de toute fonction adaptative ou protectrice. Elle est le résultat d’une lésion ou d’une maladie du système nerveux, et cesse d’être un symptôme d’alerte pour devenir une maladie en soi. La douleur neuropathique chronique est méconnue, difficile à traiter et coûteuse en termes de santé publique. Si la douleur du membre fantôme est relativement connue du grand public, des douleurs neuropathiques similaires mais souvent ignorées affectent 20 % des patients après accident vasculaire cérébral, 60 % après une intervention chirurgicale de la paroi thoracique et 75% après lésion de la moelle épinière ou sclérose en plaques. De ces patients, seulement 30 à 50 % sont correctement soulagés par un traitement médicamenteux théoriquement adapté.

Luis Garcia-Larrea et son équipe analysent la douleur normale et pathologique en utilisant un grand nombre de techniques très diverses, de l’analyse du comportement aux enregistrements électrophysiologiques et à l’imagerie fonctionnelle. De plus, ils recueillent des données enregistrées directement à l’intérieur du cerveau humain, soit au bloc opératoire, soit à l’aide d’électrodes chroniquement implantées. Ce type d’approche représente une véritable "loupe" permettant un accès unique aux activités cérébrales, avec une résolution temporo-spatiale inégalée par les techniques d’analyse conventionnelles.

Un Prix pour quoi faire ?

Ce Prix doit permettre à Luis Garcia-Larrea et à son équipe d’avancer plus loin dans leurs travaux de recherche, nécessitant parfois l’utilisation de techniques onéreuses, et qui se déclinent selon trois axes :

John N. Wood

John N. Wood

John N. Wood et son équipe : des résultats admirables

John N. Wood, âgé de 58 ans, est Professeur de neurobiologie moléculaire au Wolfson Institute for Biomedical Research (WIBR) à l’University College of London (UCL) est reconnu mondialement pour ses recherches sur les mécanismes de la douleur.

En collaboration avec le groupe de la Nociception moléculaire au WIBR qu'il dirige, John N. Wood consacre ses recherches à l'étude du fonctionnement moléculaire des nocicepteurs, qui sont les terminaisons nerveuses qui permettent de percevoir les stimulations douloureuses puis de les transmettre jusqu’au cerveau. Il a découvert plusieurs canaux ioniques, principalement des canaux sodium dont certains sont essentiels, voire uniques, dans la perception et la conduction de la douleur. Il a ainsi notamment élucidé la source de certaines douleurs viscérales, liées au froid et à l’inflammation.

Devenir insensible à la douleur neuropathique, est-ce possible ?

Luis Garcia-Larrea et John N. Wood

LLe travail récent du groupe de John N. Wood s’est concentré sur les canaux ioniques des nocicepteurs ainsi que sur l’identification des sous-types neuronaux qui sont responsables de types particuliers de sensations - par exemple, les sensations douloureuses liées à la chaleur ou à la pression. Ce travail donne de nouveaux aperçus sur le fonctionnement du système nerveux et permet d'envisager le développement de nouveaux médicaments analgésiques.

En créant divers types de souris transgéniques, John N. Wood et son équipe ont identifié un gène codant pour un canal sodique, Nav1.7, qui permet d’envoyer des signaux électriques au système nerveux central, révélant ainsi l’existence de stimuli douloureux. En supprimant ce gène, de façon à ce que la protéine ne soit plus produite, ils ont rendu les souris quasiment insensibles à la douleur. Les études génétiques chez la souris ont ainsi permis d’identifier une protéine qui s’avère être une cible très importante pour le développement de nouveaux médicaments anti-douleur. Ces nouvelles molécules thérapeutiques sont actuellement en développement.

D’autres équipes en collaboration avec J.Wood ont étudié l'expression de ces gènes de canaux sodium, générateurs essentiels de la bioelectricité associée à la douleur chez des patients atteints de désordres congénitaux, se traduisant par une absence totale de perception douloureuse. Ceci a permis de comprendre l'insensibilité quasi totale à la douleur observée chez certaines personnes. L'ensemble de ces travaux contribue à la création potentielle de nouvelles séries de molécules ayant pour cible les canaux sodium et susceptibles de soulager certaines douleurs chroniques. Il s’agit d’un enjeu d'importance puisqu'on estime que des dizaines de millions de personnes dans les pays industrialisés souffrent de douleurs chroniques pour lesquelles les prescriptions actuelles sont inadaptées ou inefficaces.

Un Prix pour quoi faire ?

L'équipe de John N. Wood

Les travaux actuels du professeur John N. Wood et de son équipe, sont réalisés par une équipe d’experts en génétique, électrophysiologie et comportement pour en savoir davantage sur les fonctions spécialisées de différentes sortes de neurones sensoriels, sur le mode de transmission de l’information par ces derniers au système nerveux central et sur l’importance d’autres types cellulaires avec lesquels les neurones pourraient interagir pour détecter des changements dans l’environnement externe. L’attribution du Prix Fondation NRJ doit permettre de soutenir financièrement certains des chercheurs de cette équipe et devrait être très bénéfique à la fois en terme de recherche fondamentale et de recherche clinique.